mardi 22 janvier 2008

Yeux noirs

Yeux noirs, chemin embrumé et cerne dessinée…
Elle a les cheveux courts, la peau claire et douce.
Son cœur est sensible comme un papillon de n-u-i-t.
Se promener parmi ces formes mystérieuses, s’imprégner de leurs cadences, bien ob-ser-ver.
Et parcourir ce visage, ces recoins, ces contours, ces re-li-efs…

Deviner son caractère, ses pensées.
Les premiers mots arrivent…

« Tu t’appelles ? »

Etre captivé par le mouvement gracieux des lèvres qui répondent

« V… »

Mais ne pas comprendre, n’avoir rien e-n-t-e-n-d-u.
Papillonner, s’attirer soi-même dans la gueule du loup.
Peut-être parce que perdu. Peut-être…
Finir par se noy-er.

Mourir une nouvelle fois.
Tout comme la première fois…
Les mêmes douleurs si familières, dans ces angles morts de mon corps…
Les gratter en vain. Et partout, sans réfléchir.
Fumer ? Pourquoi pas !
L’attente ne sert à rien. Il me faut alors agir !

Mais se retourner encore et encore dans ces draps humides de larmes que les sentiments ont formé tout autour de moi.
Puis un cri dans le froid résonne.

C’est fini !

Here comes a new challenger

L'arrivée parmi les "contributeurs" de ce blog de Florent avec son premier texte. "Yeux noirs" qui apporte de la nouveauté, avec un style qui se veut plus poétique. Bienvenue parmi nous !

dimanche 20 janvier 2008

Un drame domestique

« Salaud ! »

L’assiette atterrit à deux millimètres de mon pied. Celle-là, elle est pas passée loin. Ça doit bien faire vingt minutes qu’elle hurle mais qu’est-ce que je peux faire. J’attends. Comme un con. Elle se calme, on dirait qu’elle a eu peur de me toucher. De me faire mal.
Elle s’assoit.
« Comment… ? »
Elle a l’air triste.

J’ai rencontré Mina l’année dernière. Je suis pas du genre à être constamment à la recherche d’une nouvelle maîtresse. Elle m’est tombée dessus c’est tout. On suivait le même cours de traduction à la fac. Elle était un tout petit peu plus attirante que les autres. Un peu moins moche, un peu plus intéressante. Pas vraiment mon genre cela dit, et comme elle avait pas l’air de se rendre compte de ma présence, j’ai pas insisté. On a commencé à se voir à la fin de l’année, j’avais complètement oublié sa présence. Ça fait trois mois qu’on est pour ainsi dire ensemble.

« On n’a pas couché ensemble, c’était rien, c’est fini maintenant, c’était rien, rien du tout.
- J’te crois pas.
- On n’a pas couché ensemble.
- Je sais…mais…c’est pire. »

Je baisse la tête. Elle a pas tort.

On allait souvent au café après les cours. Dés les premières fois on s’est mis à parler beaucoup. De nos vies surtout, de la façon qu’on avait de voir les choses. On était pareil, elle avait dix ans de moins que moi mais finalement ça revenait au même. On s’entendait vraiment bien et on en est très vite venu à…

Elle a l’air très fatigué. Elle pleure je crois. Je me lève.

« Et…vous avez…
- Oui.
- Tu lui as…
- Non. Elle l’avait déjà lu. Je lui ai prêté du Vian à la place.
- Ah... Et elle ?
- C’était deux livres d’Haruki Murakami. Tu connais pas
- Non… »

On avait fini par échanger nos livres préférés, ceux qui avaient eu un sens pour nous. Elle avait déjà lu Alice au pays des merveilles alors je lui avais prêté l’écume des jours.

« Qu’est-ce qu’on fait ?
- Je sais pas. J’y peux rien je suis comme ça, c’est plus fort que moi.
- Et tu as aimé ?
- Non c’est pas mon genre.
- Tu m’aimes toujours ?
- Oui.
- Et elle, tu l’aimes ? »

Je ne réponds pas.

Elle rit :

« Tout ça pour deux bouquins. C’est bête.
- Oui…c’est bête. »

Je ne pouvais pas lui dire. Ça aurait été trop dur. « Pour deux bouquins. »

Chapitre II

Voici un petit message pour faire un premier bilan et vous annoncer une évolution.

Il me semble que le bilan à tirer est positif. J'ai réussi à tenir plus ou moins le rythme au niveau des "publications", avec en moyenne un post par semaine. A une exception près, j'ai publié tous les textes que j'ai écrits. Même ceux dont je n'étais pas totalement convaincu. Mais la plupart du temps, j'étais content de ce à quoi j'étais arrivé. Et c'est aussi ça le but : "reprendre confiance".

En revanche, seulement deux commentaires. Vous n'êtes pas très bavards... ou paresseux. Moi aussi, donc je vous pardonne. Mais essayez quand même. Juste une phrase, ça fait plaisir.

Et enfin, le plus important : l'arrivée de Maho, et de son premier texte.
Je veux faire de ce blog un objet un peu hybride, et éviter qu'il ne devienne excessivement égocentrique, comme le sont beaucoup de blogs. D'autres personnes viendront sans doute participer à ce petit projet dans les mois à venir. J'espère que les styles d'écriture et les types de textes vont être de plus en plus variés, ici.

lundi 14 janvier 2008

Un Roi sans divertissement

Ma mère a rapporté à la maison une minuscule galette des rois. Elle m’a dit qu’il leur restait que ça, au Monoprix. Et elle n’a pas compris pourquoi la vision d’une mini-galette m’a stupéfait et quelque peu terrifié. Alors j’ai dû lui expliquer.

« Cette galette des rois, tu vois, c’est une galette individuelle. Tu te rends compte... comme c’est triste. Alors quelque part, cette galette des rois met le doigt sur un problème grave. Indirectement. Le problème de la solitude dans notre société. Mais en fait elle le désigne pas comme un problème, tu vois. En fait, elle l’assimile comme quelque chose d’établi et l’inclut dans une putain de stratégie marketing. La solitude est marketée... Ca me dégoute. »

Ma mère m’a fait un signe de la tête. J’ai décidé qu’il signifiait « tu as tout à fait raison » et non « tu m’emmerdes, c’est qu’une galette».

« Attends deux secondes, en plus je me demande si... Attends.

...

Putain oui.

...

Ces cons ont mis une fève.

Ces connards se sont dit qu’il fallait mettre une fève. Ben ouais, allons-y, c’est la tradition, tout ça. Tu vois, ils se sont dit, le pauvre mec va bouffer sa galette tout seul, alors on va au moins lui donner la satisfaction d’avoir la fève. Il a une chance sur une. A tous les coups il gagne. Ils se sont pas dit que le mec devrait choisir une reine... Hein. Alors faire choisir une reine à un mec tout seul, y’a pas comme un paradoxe là ?

Bande de cons. »

Ma mère m’a pas dit d’éviter les vulgarités. C’est que, quelque part, elle était d’accord.

Et en silence, on a eu une petite pensée pour tous les rois solitaires qui se morfondent dans leur appartement vide.

samedi 12 janvier 2008

Mélodrame

J'avais envie de lui arracher les yeux mais j'ai préféré les lui laisser pour qu'il puisse pleurer. La dernière fois que j'avais vu mon frère en larmes, c'était le jour de l'enterrement de mon oncle. Cette fois-ci, il pleurait parce qu'il savait qu'il venait de faire la plus grande connerie de sa vie. Et parce qu'il ne voulait pas assister à un nouvel enterrement.

Quand j'ai débarqué à l'hôpital dix minutes plus tôt, c'est une petite vieille aux rides profondes qui m'avait accueilli avec un grand sourire. Peu de temps avant, elle avait aperçu mon frère se ruer vers les urgences. Elle m'a même confié qu'en voyant M. arriver avec la petite fille dans ses bras, elle pensait qu'il faisait un acte héroïque. On a si peu de chances de faire preuve d'héroïsme... et un nombre incroyable d'occasions de faire des erreurs.

Finalement, la vieille m'a montré du doigt la silhouette de M. Il était assis en face de la salle d'opération, la tête baissée. Il tremblait. Pendant un moment, je me suis demandé si lui aussi risquait pas de clamser. J'étais énervé mais je savais que l'engueuler était inutile. La culpabilité devait déjà être si forte. Je ne lui ai pas demandé de me raconter l'accident. De toute façon, je ne suis pas sûr qu'il l'aurait fait. L'espace d'un instant, j'ai repensé à cet automne où je lui ai appris à conduire dans un champ, dans la voiture de D. Ma mère m'en avait vachement voulu d'avoir embarqué mon frère là-dedans.

Je me suis approché de lui et c'est là que j'ai entendu les cris à l'intérieur de la salle d'opération. J'ai bouché les oreilles de M. avec mes mains. Les cris d'une petite fille qui souffre. Je me suis dit qu'il n'y avait rien de pire à entendre. Mais c'était avant qu'ils ne cessent et que le bruit strident et continu de l'électrocardioscope ne résonne dans mes oreilles.